« You are not (always) your user » : partir des utilisateurs pour construire un produit. Retour sur les ateliers du 22 mars (1/3)
L’un des enjeux du programme : concevoir en 10 mois un produit et/ou délivrer un projet qui corresponde aux besoins de ses utilisateurs et qui améliore vraiment leur quotidien. Retour sur l’atelier User and Product Research, animé par Quentin Decock et Elise Lalique.
Finalement, pour qui développons-nous ce produit ?
10 mois pour changer le service public, c’est ambitieux. Et pourtant, c’est dans cet esprit que les mentors du programme EIG ont imaginé 13 défis de transformation numérique.
En arrivant dans leurs ministères d’accueil, les entrepreneur(e)s d’intérêt général s’immergent dans la complexité administrative, découvrent les subtilités des organigrammes, et se déplacent sur le terrain pour constater la diversité des métiers du service public (Pompiers pour Prévisecours, Gendarmes pour Brigade Numérique, Sauveteurs en mer pour Prédisauvetage, Archivistes pour Archifiltre, statisticiens pour Lab Santé). Cette période d’exploration comprend bien sûr une dimension technique : travail sur les données, développement, design, etc.
Au moment de décider d’une feuille de route partagée entre EIG et mentors (voir le post de Sophie sur la feuille de route), et avant de partir dans des cycles de développement, rien de mieux que de reposer une question fondamentale : pour qui développons-nous ce produit ? Rien de pire que de développer un produit qui ne trouve finalement aucun utilisateur direct ni bénéfice mesurable.
Se mettre dans la peau de ses utilisateurs
Quentin Decock, animateur technique du Liberté Living Lab et Elise Lalique, entrepreneure d’intérêt général sur le défi Social Connect, nous ont fait part de quelques méthodes de recherche produit.
En préalable, un principe de base : « You are not your user ». On peut avoir une intuition sur une solution à développer – une application de prise de rendez-vous, un outil de remontée d’informations, etc. – qui ne corresponde pas exactement aux problèmes et aux objectifs de ses utilisateurs.
Pour pallier ce risque, rien de tel que de se mettre dans la peau de ses utilisateurs : qui sont-ils ? Comment pensent-ils ? Avec qui parlent-ils ? Quels sont, réellement, leurs problèmes, leurs peurs ? À quelles solutions ont-ils déjà accès ? Plusieurs méthodes peuvent être mobilisées pour répondre à ces questions, nous en avons évoquées deux :
1) Les entretiens utilisateurs : ils permettent de découvrir les différents types d’utilisateurs auxquels le produit pourra s’adresser, de comprendre leur quotidien et leur perception du projet. Quelques bonnes pratiques pour que ces entretiens soient utiles :
-
les réaliser en binôme : une personne pose les questions, une autre prend des notes ;
-
transmettre un compte-rendu aux personnes interviewées : pour s’assurer que ses propos ont bien été compris et restitués ;
-
informer au fil de l’eau les personnes rencontrées de l’avancée du projet.
2) Les cartes d’empathie : elles permettent d’explorer plusieurs facettes d’un utilisateur et de prioriser ensuite les problèmes et objectifs auxquels le produit pourra répondre. Souvent, ces cartes d’empathie sont des supports de dialogue au sein d’une équipe projet.
-
En réalisant ces cartes, les membres d’une équipe projet s’alignent et s’accordent sur ce qu’ils ont vu sur le terrain, lors des entretiens utilisateurs.
-
Elles permettent aussi de réaliser des catégories d’utilisateurs et de distinguer les produits et services à développer en fonction de ces catégories.
Une carte d’empathie type
Lors de notre atelier, nous avons réalisé en direct une carte d’empathie d’un des utilisateurs du défi Prédisauvetage. Elsa Luneville, Antoine Augusti et leurs mentors Laurence Matringe et Renaud Perin nous ont exposé les différentes dimensions du défi, et nous avons choisi de dessiner la carte d’empathie pour les membres des centres de sauvetage.
Les CROSS ou Centres Régionaux Opérationnels de Surveillance et de Sauvetage sont les interlocuteurs, sur le terrain, des sauveteurs en mer, et qualifient les accidents et interventions en mer, afin de transmettre au SNOSAN (Système national d’observation de la sécurité des activités nautiques) des données qui nourrissent des rapports statistiques sur l’accidentologie en mer.
Les utilisateurs du défi PrédiSauvetage
Voici le résultat de la carte d’empathie des membres du CROSS : nous avons commencé par identifier les irritants (pains), puis avons énuméré les objectifs de résultats (gains) pour ensuite détailler ce qu’ils voient (see), ce qu’ils ressentent (think and feel), entendent (hear), disent et font (say & do).
Résultat de la carte d’empathie du défi PrédiSauvetage réalisée en direct
Résultat de la carte d’empathie du défi Brigade Numérique
Adapter le cadrage de son produit à la recherche utilisateurs
Le travail de recherche utilisateurs permet ensuite d’adapter sa feuille de route. En confrontant les cartes d’empathie avec les hypothèses de départ, on peut réorienter certaines actions, prioriser des développements pour répondre à des besoins utilisateurs spécifiques, réaliser une feuille de route qui tienne compte des interactions entre les différents types d’utilisateurs. Après ce travail de recherche, place à la conception et au design (post à suivre).
L’équipe Prédisauvetage a retenu de cet atelier plusieurs résultats :
-
les centres régionaux de sauvetage (CROSS) doivent retirer un bénéfice à l’éventuelle mise en place d’un outil de remontée d’informations sur l’accidentologie ;
-
le SNOSAN (observatoire national) doit fournir aux CROSS des résultats de leur analyse agrégée.
La clef : les données de l’accidentologie en mer, qui nécessitent d’être standardisées, structurées, afin de fournir une information de qualité. L’accès aux données, leur structuration afin de créer des référentiels et leur ouverture sera abordée lors d’une session « Data » le 5 avril prochain ! À suivre donc…
D’autres méthodes de recherche utilisateurs existent, et pour cela vous pouvez consulter le site « Comment faire » proposé par la Direction interministérielle à la transformation publique, ou encore les Methods Cards de nos cousins américains de l’agence 18 F.